Il était une fois...

Cédrik est né dans le canton des Grisons, en Suisse. Il est le benjamin d'une famille de six enfants, tous des garçons. Cinq petits garçons dans une maison, ça paraît énormément. Surtout quand ils sont de petits chenapans. Toujours en train de se battre, de se chamailler et de faire des mauvais coups. Les parents en avaient plein le dos. Alors un petit garçon de plus, ça n'allaient pas les aider. Ils songeaient sérieusement à faire adopter le petit dernier, mais ils se ravisèrent quand les cinq frères protestèrent vivement. Au fil des ans, les parents constatèrent que Cédrik était beaucoup plus tranquille que les cinq autres, mais aussi que ses frères le protégeaient. Tout allait parfaitement pour cette famille plutôt nombreuse, jusqu'à ce que Cédrik atteigne l'âge de sept ans...

***

Chapitre 2

Courir.C'est tout ce qui importait en ce moment, courir. Il jeta un regard par-dessus son épaule dans la nuit noire du parc. Il ne le voyait pas, mais il savait qu'il le suivait. Cédrik avait les larmes aux yeux et il était terrifié. Une trouille bleue. Il reporta son attention devant lui, redoublant d'effort pour courir plus vite. Il arrive bientôt près des bois. Après une seconde de réflexion, il décide d'y entrer et de cacher son petit corps dans les buissons. Son coeur bat la chamade et sa respiration est rapide. Cependant, il essaie de se faire le plus discret possible pour ne pas qu'il l'entende. Les branches craquent près de l'endroit où il se trouve. Il sursaute et regarde entre les branches du buisson. Là! Il peut le voir. L'homme qui le suit depuis tout à l'heure. Il regarde autour de lui, cherchant quelque chose ou quelqu'un. L'éclat de la lune frappe un objet dans sa main... Un couteau. Mon Dieu! Cet homme veut tuer Cédrik! Il en est certain. Les larmes redoublent sur ses joues tandis que la peur monte en lui. Il se met à trembler de tout son fragile petit corps. Puis, l'homme s'éloigne en marchant lentement. Soudain: « Je sais que tu te caches! », crie-t-il de sa voix caverneuse. Le jeune Cédrik met sa main sur sa bouche et ferme les yeux avec force. Par pitié, faite qu'il s'en aille. Par pitié, faite qu'il s'en aille. Après un moment, le petit garçon ouvre les yeux et observe les alentours. Il n'ose pas sortir d'où il est. Car il ne voit plus l'homme. Il sent que c'est un piège jusque dans la moelle de ses os. Il est intelligent, alors il reste sagement où il est, attendant la suite. Cédrik prie pour que ses frères viennent à sa rescousse, car il ne pense pas pouvoir s'en sortir seul contre ce vil homme.

Plusieurs petits craquements qui se veulent discrets se font entendre juste derrière lui. Son intuition lui crie de sortir et de courir. Il décide de sortir rapidement de sa cachette et se remet à la course. Il peut entendre une série de craquements accompagnés de jurons. Il l'avait trouvé. Oh mon Dieu, il l'avait effectivement trouvé! Cédrik ne voit plus où il va à cause des larmes qui lui brouillent la vue. Il commence à désespérer. Surtout lorsque son pied se prend dans quelque chose et qu'il tombe face au sol. Il se met à ramper frénétiquement, le stress et la terreur augmentant de plus en plus à l'idée que l'homme approche trop rapidement. Des mains empoignent sa taille et le soulèvent. Il se débat comme un petit diable, mais s'arrête quand il entend chuchoter dans son oreille: « C'est moi, Cédrik. C'est Sven. » Cédrik, rassuré, se blottit dans les bras de son frère. Il peut entendre des coups et des cris: « Prends ça, salaud! », « Pour qui tu te prends?! », « C'est qu'un enfant! » et « T'es un homme mort! » Puis, ce fut le silence total. Les quatre frères s'approchèrent du benjamin. Ils mirent tous une main dans son dos de façon rassurante. Rien ne fut dis, mais des paroles flottaient dans l'air: « On sera toujours là pour te protéger. » Ils retournèrent à la maison et Cédrik ne voulait pas quitter les bras de son frère Sven.

Le lendemain matin, quand Cédrik ouvrit les yeux, il constata qu'il n'était pas dans sa chambre. Un instant, il paniqua. Mais quand il se redressa, il vit ses frères. En fait, il était dans un salon, mais pas le salon de leur maison. Pourquoi? Il ne savait pas. Il se leva et se dirigea vers ses frères qui discutaient à basse voix. Une fois qu'il fut assez près, ils se turent et le regardèrent. « Quoi? », dit le benjamin. Ce fut l'aîné, Alexandre, qui lui répondit. « Tu te demandes pourquoi on est ici, hein? Eh bien, on a découvert, cette nuit, que cet homme avait été engagé par... papa et maman... Je sais, c'est complètement débile, mais à notre arrivée à la maison, on les a entendu discuter de... ça. Je ne sais absolument pas pourquoi, mais nos parents veulent spécialement ta mort. Je ne comprend pas, parce que tu étais le favori. » Il ne voulait pas en entendre plus. Il ne le pouvait pas. Il restait là, debout, à ne rien dire. Aucun son ne voulait s'échapper de sa bouche. C'était tout simplement impossible. Sa respiration se fit plus saccadée, et son coeur débattait. Sans que personne ne s'en attende, Cédrik se retourna et courut hors de la maison. « Cédrik! » Il fallait qu'il s'en aille. Ses frères mentaient. Comment osaient-ils? Il ne savait pas où ses pieds le menaient. Il ne voyait rien. Sa vision était trop brouillé par les larmes. Il buta contre quelque chose, une racine, sûrement. Il s'étala de tout son long et resta au sol pendant quelques secondes. Quelques secondes de trop. Des mains l'empoignèrent et le relevèrent. Il ne se débattit pas, se doutant que c'était l'un des frères. Effectivement, Alexandre le tenait dans ses bras et le ramenait dans la maison inconnue. Il ne se sentait pas chez lui et il ne se sentait pas bien. Il voulait sa maman. Mais il ne pouvait pas l'avoir. Il laissa le choc l'envahir complètement et il vomit sous son effet. Puis, épuisé, il s'endormit.


Une fois de plus, ce n'est pas chez lui que Cédrik se trouvait quand il ouvrit les yeux. Par contre, le jour était levé. Cela devait faire un bon moment, puisque le soleil était haut dans le ciel. Il le voyait, car le lit de paille sur lequel il était couché était sous une fenêtre. Il se mit en position assise et sa tête tourna. Un haut-le-cœur l'assaillit, puis il pu enfin se lever. Il sortit de la petite chambre miteuse et marcha lentement jusqu'à la cuisine. Il n'y avait personne. Pareille pour le salon qui était juste à côté. Il sortit prudemment dehors. Il observa les alentours pendant un moment. Il n'y avait rien sur des kilomètres. Pas un arbre. Pas une maison. Rien. Juste de l'herbe à perte de vue. Minute. Il y avait des arbres, la veille. Il s'était pris le pied dans une racine. Le déclic se fit enfin dans sa tête. Il n'était plus à l'endroit où ses frères l'avaient amené. Son coeur manqua un battement quand il le constata et qu'au même moment, il entendit un bruit. Il entra dans la petite maison miteuse en vitesse et alla se cacher sous le divan presque moisi du salon. Il vit la porte d'entrée s'ouvrir et des pieds chaussés de bottes. Il ne savait pas qui s'était et il ne voulait pas le savoir. Il retint sa respiration du mieux qu'il put. Les pieds s'avancèrent dans la pièce. « Je sais que tu te caches, petit. Mais ça ne sert à rien. » Cette voix... Oh non! Cédrik devint blanc comme un drap et sa respiration accéléra d'un cran. Il se mit à trembler et les larmes se mirent de la partie. Comment avait-il fait pour le retrouver et l'enlever le soir même? C'était impossible, ses cinq frères l'avaient tabassé. « Tu es sous le divan. C'est la seule véritable place où tu peux te cacher. Sors de là, vermine. » Cédrik ferma les yeux un court instant. Il savait qu'il n'avait pas le choix de faire ce que l'homme disait.. Il sortit lentement de sous le divan en piteux état. Il se mit debout face à son kidnappeur. Il put constater les ecchymoses sur son visage gras. Cet homme n'était pas particulièrement gros, mais il était en aussi piteux état que sa maison. C'est à ce moment que le coeur de Cédrik cessa de battre. L'homme levait une carabine vers lui. Il resta figé et c'est comme si tout se passait au ralentit. Par contre, il ne vit pas venir le coup de feu. L'homme lui avait tiré dans la jambe. La douleur fut fulgurante et éclata dans sa jambe, le faisant hurler de douleur. « Maintenant, tu va souffrir. » Il se mit à rire, alors que Cédrik s'effondrait au sol en se tenant la jambe de toutes ses forces. Le sang s'échappait de sa blessure à toute vitesse. L'homme s'approcha et le frappa en plein visage assez fort pour lui faire perdre connaissance.


Quelques années de pures souffrances passèrent. Cédrik était maintenant âgé de 12 ans. Ces cinq dernières années avaient passées de façon affreusement lente. Il n'y avait rien eu de nouveau ou de spécial durant ce temps. Cela avait été cinq longues années monotones et douloureuse. Chaque fois que Cédrik se réveillait, il espérait que ses frères l'avaient enfin trouvé. En vain. Ce matin-là, il se levait avec plusieurs blessures. Quelques coupures et un bras cassé. Il avait tenté de se faire un soutient pour que son bras guérisse comme il faut, mais son bourreau l'avait brisé. Il le brisait à chaque fois. Depuis ses sept ans, quand l'homme lui avait tiré dans la jambe avec sa carabine, il ressentait la balle dans sa jambe à chaque pas qu'il faisait. Il avait guéri avec la balle dans sa jambe gauche. Il avait parfois du mal à marché. Son bras était mal ressoudé. Il ne pouvait plus le plier ni bouger sa main. Il était piteux. Sous ses yeux de gros cernes noirs avaient fait leur apparition. Il ne dormait pas bien parce qu'il avait mal. La plupart de ses nuits se résumaient à environ 3 heures de sommeil. Le reste du temps, il avait pratiqué sa main gauche et il s'était remis au dessin. Il était gaucher à la base, mais l'homme lui avait tordu le poignet. Heureusement, il n'avait pas été cassé. Dans sa chambre, alors qu'il était enchaîné, il dessinait pour passer le temps. De magnifiques dessins morbides, reflétant sa situation. Il avait aussi recommencé à jouer des personnages. Même s'il n'allait plus à l'école, il se pratiquait. Juste au cas où. De toute façon, il avait toujours été surdoué à l'école. Cela lui manquait. Il entendit un déclic et ne réagit même pas à l'entrée de cet homme devenu beaucoup trop familier. Il leva les yeux vers le nouveau venu et constata sans surprise qu'il traînait encore cette foutue carabine. Celle-là même qu'il l'avait blessé cinq ans plus tôt. Son regard mort glissa jusqu'à retourner sur ses dessins. Cédrik entendit un bruit, puis vit ses dessins partir en flammes. La fureur, la tristesse et l'étonnement l'envahirent. Ce salopard allait le regretter.

Mais il n'eût pas le temps de faire quoi que ce soit qu'un chahut se fit entendre dans la cuisine. Pendant que l'homme, clairement paniqué, se retournait et sortait, Cédrik se mit péniblement debout avait un cliquetis de chaîne. Il entendit plusieurs coups de feu accompagnés de cris. Il attendit patiemment debout que quelqu'un apparaisse devant lui. Il en tomba presque lorsqu'il vit son frère Alexandre au pied de la porte. Mais l'homme était derrière lui et il ne doutait pas un seul instant qu'il allait tirer. « Baisses-toi!!! » Alexandre n'hésita pas une seconde pour lui obéir. Juste au moment où l'homme tirait. La balle passa juste au-dessus de la tête de son frère. Malheureusement, elle le percuta en plein ventre, le propulsant vers l'arrière. Il entendit son nom et un autre coup de feu avant de voir le visage d'Alexandre au-dessus de lui. Il allait mourir. Enfin. Après toute cette souffrance. Il en était sûr. L'hôpital le plus proche se situait à des kilomètres de là. Il ferma les yeux et tout devint noir.


Lorsqu'il ouvrit les yeux, Cédrik sut immédiatement qu'il était dans une chambre d'hôpital. Sa jambe était dans le plâtre ainsi que son bras presque en entier. Il y avait plusieurs bouquet de fleurs et de ballons dans sa chambre. Mais surtout il y avait cette peluche dans ses bras. Un ourson avec un oeil de pirate. Il l'adorait. C'était pile dans ses goûts. Il le serra contre lui de son bras valide, se sentant réconforté par cet ourson. Il l'aimait déjà. La porte s'ouvrit et laissa entrer ses cinq frères. Ils avaient tous l'air inquiet. Ils s'approchèrent. Ils lui posèrent quelques questions, mais il ne répondit à aucune. Sa coquille durement forgée pendant sa disparition de cinq années était trop épaisse. Il ne faisait plus confiance à personne. Il voulait la paix, la solitude et il voulait retourner à l'école. Ce fut la seule chose qu'il dit. Alors ses frères, après s'être tous consulté du regard, acquiescèrent et sortirent de la chambre.

Quelques jours plus tard, bien que Cédrik soit toujours à l'hôpital, un professeur particulier vint lui rendre visite. Il allait lui donner des cours intensifs dans les matières les plus importantes et deux autres profs allaient venir lui enseigner les arts plastiques et les arts de la scène. Mais c'était pour quand il allait être considérablement guérit de ses blessures. Les jours passèrent et il se trouva qu'il était toujours aussi surdoué à l'école. Depuis quelques temps, Cédrik avait décidé de se teindre les cheveux en violets et de porter des verres de contact. De toute façon, avec tout ce que l'homme dont il ignorerait le nom pour toujours lui avait fait, il avait besoin de lunettes. Mais pas question de porter ces affreuses choses à longueur de journée. Il suivit des cours de réhabilitation et put bientôt sortir de l'hôpital pour pouvoir continuer ses cours à l'école parmi les autres. Il traînait toujours sa peluche avec lui où qu'il aille. Il se foutait bien que les autres se moque de lui. Ils ignoraient tous que cette peluche l'avait sauvé dès son réveil et ils ne savaient pas ce qu'il avait vécu ces cinq dernières années. Il passa 3 ans à étudier et à apprendre tout ce qu'il aurait dû apprendre à la place d'être prisonnier d'un homme fou à lier maintenant mort. C'est à l'âge de 15 ans qu'il décida qu'il en avait assez et qu'il s'éclipsait au Japon dans un pensionnat pour pouvoir vraiment repartir à zéro.


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